L'opération cosmétique de Cuba
" «Ces nouvelles libérations ne sont pas synonymes d’amélioration pour la population cubaine», affirme le professeur et écrivain cubain en exil Jacobo Machover. Ce dissident se bat depuis la France aux côtés de ces «compagnons de luttes» emprisonnés dans les geôles castristes depuis plus de sept ans. La libération effective et l'expulsion vers l'Espagne, au total, de 11 prisonniers politiques cubains et de leur famille est une «bonne nouvelle». Néanmoins, ces prisonniers servent «de monnaie d'échange à la dictature cubaine», et cela permet à Castro de faire un peu moins mauvaise figure au niveau international alors même que l'Union européenne augmente la pression.
Le régime mène depuis cinquante et un an la guerre contre ce qu'il appelle «l'ennemi intérieur», justifiant ainsi la répression et les arrestations arbitraires. En 2003 un nouveau durcissement du régime avait entraîné l'arrestation de 75 journalistes et activistes des droits de l'homme condamnés à des peines allant de six à vingt-huit ans de prison. Ce sont certains d'entre eux qui sont libérés ou devraient l'être ces prochains mois. Il est pourtant encore trop tôt pour savoir si cela annonce un assouplissement ou s'il s'agit d'une simple mesure de façade. Selon un récent rapport de l'ONG Human Rights Watch, Raúl continue en effet la même politique répressive instaurée par son frère aîné, Fidel. Ainsi, le décret 217 limite, entre autres, la circulation des journalistes et des militants des droits de l'homme. Il y aurait encore plusieurs centaines de détenus politiques, qui ont été arrêtés en tant que tel, ou sous des inculpations de droit commun. Les dissidents attirent depuis peu l'attention de la communauté internationale, notamment avec les grèves de la faim de Guillermo fariñas ou d'Orlando Zapata (décédé en février dans les geôles cubaines).
«Il n'est plus possible pour ce gouvernement de laisser mourir des gens en prison, car l'image renvoyée au monde est trop dévastatrice», observe Jacobo Machover soulignant que «le régime cubain se trouve à un moment charnière ce qui ne veut pas dire qu'il va basculer mais il est affaibli et la dissidence se trouve renforcée». Contraint de lacher du lest, Raúl Castro a choisi comme interlocuteur l'Église catholique. Pour la première fois depuis l'instauration du régime, elle est ainsi entrée en lice avec une intervention de l'archevêque de La Havane, Monseigneur Jaime Ortega. «[L'Église] était plus un porte-parole de la cause des prisonniers qu'un médiateur»k,explique Jacobo Machover. Le régime est en difficulté et contraint de faire des concessions. Pour ce dissident cubain en exil, «c'est maintenant qu'il faut accentuer la pression».
Libération n°9075
A lire : Octavo cerco Blog d'une jeune cubaine de vingt six ans qui écrit depuis La Havane
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