"In the Loop" : Les dessous risibles de la guerre en Irak
"Comme on s'en souvient peut-être, le Royaume-Uni s'est rangé aux côtés des Etats-Unis lors de l'intervention américaine en Irak. Il n'y a pas de quoi rire, et pourtant le processus qui a mené à cette décision fournit, six ans plus tard, la matière d'une excellente comédie politique. L'Irak n'est jamais mentionné tout au long d'In the Loop, mais on voit très bien de quoi il retourne.
Simon Foster (Tom Hollander), jeune et pas très brillant secrétaire d'Etat au développement international, s'écarte légèrement de la ligne du gouvernement de Sa Majesté en déclarant à une meute de journalistes qui font le trottoir que la guerre est "imprévisible". Il s'attire ainsi les foudres du redoutable Malcom Tucker (Peter Capaldi), responsable de la communication gouvernementale. Inspiré d'Alastair Campbell, qui occupa ces fonctions auprès de Tony Blair, Tucker est écossais comme son modèle et d'une grossièreté à faire rougir Joey Starr. L'un des plaisirs qu'offre In the Loop consiste à l'écouter égrener des chapelets d'insanités d'une immense invention verbale. C'est un cours d'anglais comme vous en prendrez rarement.
L'autre plaisir vient d'une vision assez limitée mais réjouissante de la vie des grands qui nous gouvernent. Loin des visions paranoïaques américaines, Armando Iannucci préfère expliquer les événements qui viennent de façonner notre planète par la lâcheté et l'incompétence des puissants et de ceux qui aimeraient l'être.
Simon Foster est ainsi envoyé à Washington, une mission prestigieuse qu'on lui confie en échange de sa promesse de se tenir à carreau. Accompagné par son chargé de communication à lui tout seul (Chris Addison), un grand dadais que l'on croit un instant un peu moins faillible que ses supérieurs, avant de déchanter en riant, le jeune secrétaire d'Etat se conduit comme n'importe quel cadre moyen à qui l'on offre deux nuitées dans un hôtel quatre étoiles.
Défaite de la vérité
Cette excursion diplomatique permet au réalisateur d'employer quelques acteurs américains parmi lesquels James Gandolfini, qui tient le rôle d'un général opposé à la guerre. Il faut dire qu'Armando Iannucci a rodé sa méthode à la télévision, ce qui explique sans doute qu'il ait tenu à la présence de la star des "Soprano", qui tient avec superbe le contre-emploi qui lui est proposé (enfin, son personnage est pacifique, mais pas au point de ne pas menacer de mort un opposant).
In the Loop (qui peut se traduire par "dans le circuit") procède d'une série diffusée par la BBC, In the Thick of It ("en pleine tempête"), réalisée par Iannucci et interprétée par une partie de la distribution du long métrage. Le feuilleton était déjà filmé par une caméra portée qui zoome de façon inopportune sous le nez des personnages. Cette façon de faire, assez répandue de nos jours, vient elle-même d'une autre série télévisée, The Office, version britannique. La série de Ricky Gervais est à cette décennie ce que Monty Python fut aux années 1970, un prototype humoristique qui a changé la fiction comique des deux côtés de l'Atlantique.
Pourtant In the Loop n'est pas un gros épisode télévisé. Au lieu de chroniquer au jour le jour les petits malheurs d'un cabinet ministériel comme il le faisait sur le petit écran, Armando Iannucci et ses scénaristes (qui travaillaient aussi sur la série) ont construit un récit dramatique, qui se clôt, comme dans la réalité, sur la défaite de la vérité. Les opposants à l'invasion de l'Irak, qui ont sûrement gardé le souvenir de leur impuissance, trouveront une consolation plaisante dans l'exposition impitoyable de la médiocrité des va-t-en-guerre."
Le Monde.fr 17 novembre 2009
Malheureusement, impossible de trouver In the loop en version originale sous titrée. Il faut absolument le voir en anglais sinon ça achève un certain nombre de blagues et surtout, ça nous prive de la variété du vocabulaire anglo-saxon, magnifiquement mise en scène lors des longues tirades insultantes de Malcom.
In the loop en Version française
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